vendredi 11 novembre 2011

Synthèse de l'Eloge de l'amour par Béatrice Rouppert

En préambule au commentaire philosophique qu' Henri Callat va nous faire, je vous propose une courte synthèse du livre d’Alain Badiou, Eloge de l’amour.
En renvoyant dos à dos la conception romantique de l’amour et son extase de la rencontre, l’illusion des sceptiques ainsi que l’option du contrat, Badiou éclaircit notre réflexion concernant l’amour. Il repousse aussi la définition chrétienne qui confère une source transcendantale à l’amour et conduit les humains à accepter la souffrance pour leur bien et celui de la collectivité en considérant que cet amour-là est passif et instrumentalisé. Tout comme chez Lévinas, dont il dénonce la confusion faite entre philosophie et morale dans son concept d’amour «tout en oblation».
Alors que dit Badiou lui-même de l’amour?

 Il pose quatre conditions pour en parler: être à la fois un savant, un artiste, un militant et un amant, vaste programme …. Puis il pose la question suivante «qu’est-ce que l’amour quand on l’aborde à deux à partir de la différence?» et non pas à partir du un comme souvent proposé.
La rencontre – qu’il nomme événement ou hasard- devient le point de départ d’un processus à partir duquel l’amour peut se construire de deux points de vue. Cette rencontre ouvre «la possibilité de l’impossible» dit-il.
Mais cette voie est étroite, elle demande à la fois un engagement obstiné et une remise en cause permanente. C’est là me semble-t-il que chacun peut rejoindre les propos du livre. Badiou insiste aussi sur la nécessité de refaire le «choix initial» en toute conscience tout au long du parcours, de «re-déclarer» son amour en quelque sorte.
On voit que Badiou propose ainsi une définition dynamique et optimiste de l’amour en totale opposition avec les philosophes cités au début.
Ce processus va ouvrir la possibilité d’une construction de vérité, thème déjà abordé par Badiou dans son livre, L’éthique.
Si cela est possible à deux, qu’en est-il pour le collectif? Que peut-on créer à plusieurs qui soit en même temps reconnaissance de la différence et égalité? Tout en luttant contre la réaction identitaire actuelle et contre les tenants de la société libérale qui considèrent que l’amour est un investissement trop risqué pour être tenté.
Tout au long du livre on sent que ce processus réclame un total désintéressement très loin de notre société actuelle, mais il donne aussi une force de résistance aux modèles imposés. A condition d’être dans la durée, l’obstination et la fidélité, Badiou nous dit que nous pourrions transformer ce hasard de la rencontre en destin.
C’est la «morale provisoire pour temps désorienté» d’un philosophe idéaliste et émancipateur.

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